De Raphaël Depallens
La pandémie de COVID-19 a révélé les fragilités des systèmes de santé mondiaux. Aujourd’hui, les crises se succèdent sans répit : conflits, migrations, inégalités croissantes, et recul des droits fondamentaux. Dans ce « nouvel ordre mondial », les moyens sont plus limités, mais les besoins, eux, ne cessent de croître. Le défi est donc de faire mieux avec moins, en réinventant les alliances et les approches. L’Europe, malgré ses propres défis, pourrait jouer un rôle moteur dans cette transformation, et pourquoi pas la Suisse ?
Stela Bivol (OMS) — « En Europe, il y a plus de personnes qui contractent le VIH que celles qui reçoivent un diagnostic. » Cette phrase souligne un enjeu majeur dans la cascade de dépistage du VIH dans la région européenne de l’OMS : un grand nombre d’infections ne sont pas détectées à temps, ce qui freine les efforts de prévention et de traitement.
Situation du VIH en Europe et en Suisse : le défi
Selon le rapport 2024 de l’OMS Europe et du Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC), l’Europe fait face à plusieurs défis majeurs :
- 113 000 nouveaux diagnostics de VIH ont été enregistrés en 2023 dans 47 des 53 pays de la région européenne de l’OMS, soit une augmentation de 2,4 % par rapport à 2022.
- Près de 30 % des personnes vivant avec le VIH ignorent leur statut sérologique, freinant les efforts d’éradication.
- 52 % des diagnostics sont posés tardivement, ce qui augmente les risques de comorbidité et de mortalité liés au sida.
- Dans l’Union européenne et l’Espace économique européen (UE/EEE), le taux de nouveaux diagnostics a augmenté de 12 % entre 2022 et 2023, en partie grâce à une intensification du dépistage et à une meilleure détection dans les populations migrantes. [who.int]
Situation du VIH en Suisse (OFSP)
Épidémiologie
- En 2023, 352 nouveaux cas de VIH ont été déclarés à l’OFSP, dont 83 cas de sida, ce qui met en avant le temps entre le moment ou la personne a acquis le VIH et le moment du diagnostic qui est excessivement long !
La santé mondiale en crise : le contexte
Lors de cette session, il a été affirmé que des figures comme Donald Trump ne sont que les symptômes d’un dysfonctionnement plus profond dans la coordination mondiale mais aussi sur le plan local, notamment en termes de santé. La fragmentation des efforts cliniques, de prévention et de recherche appelle à une mobilisation renouvelée pour garantir l’accès à la santé. Ce n’est sans aucun doute pas une situation passagère, il est donc nécessaire de considérer qu’il faudra se réinventer avec moins de moyens et en développant d’autres formes de partenariats.
Pistes d’action concrètes sur le VIH :
1. Intégrer les soins comorbidités (dépistages) dans les services
- Action : Développer des parcours de soins intégrés incluant le dépistage et le suivi du diabète, de l’hypertension et des troubles de santé mentale dans les structures VIH. Pour la Suisse, cette recommandation concerne la santé mentale.
- Référence : WHO guideline on HIV service delivery – Sept 2025 [who.int]
2. Renforcer l’adhésion au traitement par des interventions personnalisées
3. Valoriser les savoirs communautaires et les expériences vécues
4. Développer des outils de formation pour les professionnel·le·s
5. Plaidoyer pour une approche inclusive et équitable
- Action : Mobiliser les acteurs associatifs et institutionnels pour faire évoluer les politiques publiques vers une reconnaissance des droits des PVVIH.
- Référence : UNAIDS Political Declaration Implementation Report – 2025 [unaids.org]
- Exemple : Face aux inégalités d’accès, des accords stratégiques ont été signés pour les pays à revenu faible et intermédiaire :
- Le Global Fund et Gilead fourniront le lénacapavir sans profit dans 120 pays, visant 2 millions de personnes d’ici 2027. [who.int]
- Des versions génériques seront développées par Hetero Labs et Dr. Reddy’s Laboratories à un coût de 40 USD par patient.e.x.s par an.